mercredi 8 septembre 2010

Grève du 7 septembre 2010

Aujourd'hui, les français, tous âges confondus, derrière les bannières de leurs syndicats ou tout simplement là pour s'exprimer, sont descendus dans la rue. Le motif de cette colère, le dossier des retraites géré de main de maître par un chef d'orchestre expert en précipitation. Hélas, ses musiciens jouent séparément leurs parties, à des vitesses différentes, des tonalités personnelles et sur des instruments désaccordés, pour un résultat brouillon. Quand certains pays d'Europe du nord sont parvenus à des solutions en sept années, notre VRP multicartes et multifonctions, accessoirement Chef de l'État, a décidé de tout bouclé, de tout bâcler, avant la fin de son mandat sans consulter qui que ce soit, le tout chronomètre en main. Sait-il qu'il y a des gens qui vivent dans ce pays, le petit Nicolas? Sait-il que son dossier des retraites, tel qu'il risque d'être emballé, va déferler sur les générations à venir? S'en soucie-t-il seulement? Non, surement non!

La République a-t-elle été abolie? Nous aurait-on caché quelque chose? On peut se poser la question. En tout cas, si la République ne s'est pas éteinte, elle est sérieusement amochée. D'abord, qu'est-ce que c'est que ça, « la République »? Pour Monsieur S., qui habite le palais de l'Élysée, dont le peuple français est le propriétaire légal, soit dit en passant, voici quelques définitions qu'il devra étudier entre deux accords de guitare :
  1. La république est un système politique dans lequel l'État doit servir le « bien commun » et non des intérêts privés. La souveraineté appartient au peuple qui exerce le pouvoir politique directement ou par l'intermédiaire de représentants élus. Ceux-ci reçoivent des mandats pour une période déterminée et sont responsables devant la nation. Par ses représentants, le peuple est la source de la loi. L’autorité de l'État s’exerce par la loi sur des individus libres et égaux.
  2. Dans leur sens originel les termes "république" et "démocratie" sont assez proches, cependant "république" permet de faire la distinction avec les régimes monarchiques. De nos jours l'utilisation du terme République dans la désignation d'un Etat, ne suffit pas à faire de celui un état démocratique. C'est par exemple le cas si une partie de la population ne peut participer aux élections ou présenter ses candidats. Le mot république, abusivement employé, peut ainsi cacher une dictature, une oligarchie ou une théocratie.
Il y a dans ces deux définitions largement de quoi réfléchir. Il y est fait mention de quelques notions, manifestement fondamentales, sur lesquelles j'aimerais attirer l'attention du gouvernement actuel.
  1. « Le bien commun est un principe philosophique représentant ce qui est accessible à tous, comme par exemple des moyens permettant à chacun d’accroître ses propres connaissances. Le bien commun est également devenu par extension une notion d'économie, s'appliquant par exemple à l'eau, ou encore à la biodiversité. »
  2. Servir : S’acquitter de certains offices, de certaines obligations envers une personne ou une collectivité; Faire le service militaire; S’acquitter de certaines fonctions auprès de quelqu’un comme domestique; Rendre à quelqu’un les mêmes services qu’un domestique rend à son maître; Fournir, s'occuper de ...
  3. Je laisse le soin au lecteur de relier les deux points précédents pour définir ce que signifie: servir le bien commun. Pour ceux du gouvernement qui ne sauraient pas, voici une réponse. Servir le bien commun, c'est s'acquitter de certaines obligations envers la nation sur ce qui sera accessible à tous. Comment? Par le dialogue, les négociations, et en bonne intelligence. Il suffit de rencontrer les français, pour cela, un avion présidentiel est inutile. De plus, aujourd'hui, ils étaient dans la rue.
  4. Les notions « d'intérêts privés » et de « bien commun » s'opposent traditionnellement et il n'est guère utile de s'étendre sur le sujet plus que nécessaire. Je serais tenté de dire que servir les intérêts privés, en ce qui concerne le gouvernement, c'est satisfaire ses propres amis, les membres de son parti, les industriels qui ne veulent rien entendre et tous ces courtisans qui s'accomodent de la « monarchie républicaine »
  5. Dans une république, les représentants élus reçoivent un mandat pour une période déterminée et sont responsables devant la nation. Il est quand même plus qu'étonnant que la France, qui prétend avoir répandu la liberté sur toute l'Europe, la France des « lumières » soit démocratiquement en retard par rapport à des pays limitrophes tels que la Suisse ou l'Italie. La nation, dont la constitution affirme qu'elle est souveraine, n'a pas son mot à dire: elle peut juste défiler dans les rues.
  6. Dans la deuxième définition, il est spécifié qu'un régime où « une partie de la population ne peut participer aux élections ou présenter ses candidats » n'est pas une république démocratique. La France n'est donc pas une république et elle n'est pas démocratique non plus, mais cela, je l'avais déjà démontré : d'une part, les français, même s'ils peuvent voter, ne sont plus entendus ni écoutés et d'autre part, pour être candidat, il est fixé des conditions draconiennes et prohibitives. (Les fameuses 500 signatures...)
Le candidat à l'élection du président de la république soutenu par la « royauté républicaine » était à Rouen parmi les manifestants, c'est à dire avec ceux qui s'expriment et que le gouvernement n'a pas pris la peine d'entendre lors des deux dernières démonstrations, comme disent nos amis allemands. Je suis ce candidat et j'avoue avoir été surpris par un fait fort étrange : dans le décompte des manifestants, les syndicats ont dénombré deux millions et demi de personnes tandis que le ministère de l'intérieur n'en comptait qu'un million et deux cent milles. Un millions trois cent milles mécontents se sont donc purement et simplement évaporés. Où étaient-ils donc passés?
Il faut savoir que les chiffres sont magiques dès qu'ils sont manipulés par les ministres ou le gouvernement. C'est avec des tours de passe-passe dont les recettes sont désormais connus que, par exemple, le nombre des demandeurs d'emploi diminue. Les chômeurs n'ont même plus besoin de trouver un emploi, ils disparaissent tout simplement des listes. Il en est de même avec les manifestants. La subtilité consiste à déterminer sur le trajet qu'emprunteront les mécontents une bande de distance fixe: tout ce qui marche à l'intérieur est comptabilisé uniquement par les renseignements généraux, que tout un chacun parvient désormais à détecter le long du cortège, les autres, ceux qui marchent sur les trottoirs ou hors de ladite bande, ne sont comptés que par les organisations syndicales. La prochaine évolution de cette méthode dite « comptage avec prestidigitation » consistera en une réduction de la bande de passage. Les mécontents devront impérativement défiler en file indienne en prenant soin de ne jamais poser un pied hors de la ligne dite « ligne de comptage ».
L'avenir étant technologiquement fort prometteur, il ne manquera pas de nous surprendre et de nous étonner. Une jour prochain, le dénombrement pourra se faire de manière plus pratique, plus simple et plus fiable que la technique dite du « comptage en troupeau ». Voici quelques méthodes avant-gardistes (pour le moment) :
  1. Les manifestants se feront tatouer sur l'avant-bras ou sur la nuque des codes-barres contenant des informations que les renseignements généraux pourront aisément exploiter : nom et adresse du manifestant, et toutes sortes de données personnelles voire confidentielles. Les agents compteurs n'auront plus qu'à flasher les individus comme le font déjà les caissières des supermarchés sur les étiquettes des produits qui ne passent pas sur le tapis roulant.
  2. Toute la population se fera implanter une capsule sous l'épiderme; elle contiendra toutes les données nécessaires, personnelles et intimes de chaque individu, une sorte de carte vitale sécuritaire digne des romans de science fiction. Des portiques de détection seront implantés partout pour pister la population :
    - à l'entrée des voies de manifestation, pour dénombrer les mécontents, dresser des listes (pour retirer automatiquement les journées de grève des salaires, les licenciements et autres tracasseries administratives)
    - sur les axes de circulation principaux des villes ou devant des bâtiments officiels tels que les préfectures, les mairies, les ministères et j'en passe (pour les procès-verbaux, amendes et autres relevés d'infractions)
  3. Les mécontents, avant de revendiquer quoi que ce soit, devront retirer des formulaires dans des établissements éloignés, inaccessibles en voiture et avec des horaires d'ouverture prohibitifs. Ils devront les comprendre, les remplir entièrement sans rien omettre, en faire des copies par leurs propres moyens et les retourner dans des délais abracadabrants à des organismes qui ne leur adresseront aucune réponse. Les mécontents (ceux qui se seront risqués à suivre la procédure jusqu'à son terme) à défaut d'obtenir satisfaction, pourront être soumis à un contrôle fiscal draconien ou être accusés de révisionnisme. On ne conteste pas la politique du Prince (c'est comme ça qu'on appelle le Président de la République en France. Voir un complément d'information en fin de texte.)
Avant de dire que ces exemples sont excessifs ou paranoïaques, demandez-vous pour quelles raisons le gouvernement de Monsieur S. , qui en a d'ailleurs fait un de ses arguments de campagne électorale, est obsédé par cette vision dite « sécuritaire » du monde. Faites des recherches sur ce que le gouvernement, en sourdine, prépare pour les syndicats en 2013 ou sur tout autre dossier du même genre et tout aussi inquiétant. Vous comprendrez que si vous n'avez pas défilé pour le retrait du projet sur les retraites pour ne pas perdre une journée de salaire, la république des menteurs vous donnera largement l'occasion, dans un avenir hélas proche, de descendre dans la rue. Ce jour-là, marchez bien sur la ligne ou vous ne compterez pour rien... Comme maintenant.
« La république était belle sous l'empire... »
Complément d'information à propos de la politique du Prince:
A l'origine, ce n'était pas péjoratif, c'était le titre de Louis-Napoléon Bonaparte, le futur Napoléon III, lorsqu'il était président de la deuxième république. Il était prince puisque descendant de l'Empereur et avait été élu Président de la République au suffrage universel en 1848. Il était Prince-Président.

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