samedi 25 septembre 2010

Les valeurs républicaines - partie 1.

Un sujet amuse régulièrement nos politiciens, qui en débattent avec fougue comme si le monde risquait de s'arrêter s'ils n'en évoquaient pas la nature ou le fond : non, ce n'est pas « l'identité nationale », autre prétexte à discorde tapageuse, certes, mais « les valeurs républicaines ». Dès qu'ils sont pris d'une colère calculée à propos d'un événement souvent anodin au départ, nos élus, toutes opinions confondues, les exhibent et les agitent bien haut dans un ciel médiatique déjà fortement encombré de billevesées. Que contiennent-elles donc, ces valeurs, et qu'est-ce qu'elles ont de si républicaines? Avant toute chose, où les trouver? C'est très simple : dans les textes fondateurs de notre république. Le premier libraire sérieux aura un exemplaire du texte complet de la Constitution, contenant la « Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen » (celle de 1789 et non les suivantes; c'est à dire celle de 1793 et celle de 1795), le préambule de la Constitution de 1946, la « Charte de l'Environnement » de 2004 et la « Constitution de la Cinquième République » contenant toutes les révisions (dont celle de 2008) et mise à jour. Tout cela est commercialisé depuis peu.
Petite note. L'article 35 de la « déclaration des droits de l'homme de 1793 » (noté ici sans les majuscules requises pour un texte de référence) précise ceci: « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » Les français, dont le gouvernement va saccager les retraites, qui ont manifesté contre le projet de loi pourraient se comporter différemment s'ils connaissaient cet article. Il est vrai qu'à l'époque où il a été rédigé (période dite de « la Convention ») les choses étaient différentes : on avait un goût prononcé pour les effusions...
Pour revenir à nos moutons, les valeurs républicaines sont les suivantes (dans l'ordre alphabétique):

  1. Démocratie.
Rappel des définitions communément admises.

  • La démocratie est le régime politique ou, plus largement, un corpus de principes philosophiques et politiques, voire le phénomène social égalitaire, dans lequel le peuple est souverain et détient le pouvoir collectivement.

  • Système politique fondé sur le respect de tous qui généralise le dialogue et encourage la participation du peuple à tous les niveaux de tous les organes de la société civile.

  • État dans lequel les représentants élus du peuple détiennent le pouvoir.
La démocratie et ses diverses variantes ont déjà fait l'objet d'un développement particulier. Le lecteur, s'il le souhaite, pourra consulter le message du blog correspondant. J'ajouterai que la démocratie a cela de pratique qu'on peut la mettre à toutes les sauces sans jamais la mettre à exécution: tout dépend du sens donné à ce dernier mot (exécution, du verbe exécuter).
Exécuter:

  • Mettre à effet ; agir pour qu'une chose soit faite.

  • Faire un ouvrage quelconque, d’après une esquisse, un projet, un plan, etc...

  • Effectuer les commandes d'un programme, jouer une partie musicale, réaliser un document au net (ou au propre).

  • Tuer, assassiner, mettre à mort.
Autre particularité de son adjectif, tout comme islamique, pourtant considérés comme incompatibles (pour toutes une série d'imbéciles des deux camps), n'importe quel objet, concept, idée farfelue ou régime gouvernemental peut être bombardé démocratique (ou islamique). Les exemples ne manquent pas. Pire même, deux états démocratiques (ou islamiques) similaires en apparence, peuvent très bien se faire une guerre dévastatrice parce que l'un des deux prétendra être plus démocratique (ou islamique) que l'autre.
La démocratie est souvent utilisée comme paravent pour permettre à une caste, une élite, des anciens élèves de l'ENA, bref des gens qui savent (ou s'imaginent qu'ils savent sans rien connaître) de faire leur petite cuisine dans leur coin en organisant de temps à autres des élections dont les résultats ont autant d'influence sur leur politique que le Comité Miss France sur le développement des énergies durables. On parle, dans ces cas-là, de vitrine démocratique.

  1. Dialogue.
Le dialogue n'est pas considéré comme une valeur républicaine à part entière. Il faut dire que lorsqu'un ministre ou un député brandit le lampion des valeurs républicaines, c'est généralement restrictif. S'il parle de laïcité, c'est pour empêcher un phénomène qui le gène ou qu'il voudrait voir gêner ses compatriotes, dans un but purement polémique sans doute, à moins que ce ne soit une méthode psychanalytique nouvelle pour dire « J'existe aussi! » S'il parle de dialogue, c'est également restrictif : soit il ne va rien écouter ni entendre de ce qui va se dire, soit il va faire taire ses interlocuteurs par un pirouette législative ou constitutionnelle nouvellement adoptée. La définition du mot « dialogue » pourrait être : « Faites silence car je vais parler et vous allez m'écouter. Si vous ne voulez pas obtempérer j'ai les moyens de vous imposer mes vues! »
Plus sérieusement, le dialogue, c'est quoi?

  • Le dialogue est une communication entre deux ou plusieurs personnes ou groupes de personnes visant à produire un accord. Il doit y avoir au minimum un émetteur et un récepteur. Une donnée émise, c'est le message. Un code, c'est la langue et/ou le jargon. Un objectif, c'est le but du message.

  • Conversation, entre deux ou plusieurs personnes; Discussion ou négociation, souvent dans un contexte social ou politique; Répliques échangées par les personnages d’une pièce de théâtre, d’un film, d’une églogue, et la manière dont l’auteur fait parler entre eux les personnages qu’il met en scène.

  • Chez Platon, forme de recherche philosophique de la vérité. Dans la pensée contemporaine, communication des consciences. En politique, effort de conciliation par la discussion. Dans tous les cas, respect de l'autre.
Dans ces définitions officielles (disponibles dans le dictionnaire ou sur wikipédia) le dialogue est l'instrument qui permet d'arriver à un accord (sans jeu de mot, s'il vous plaît!) pour la réalisation d'un objectif, d'un but commun. Ce n'est pas pour rien non plus si on retrouve le termes de négociation, conciliation et discussion. On peut donc conclure que c'est par le dialogue, et la bonne intelligence, que les problèmes trouvent leurs solutions et que la force, dans la balance, fait généralement pencher tout projet du mauvais côté.
Le dialogue est donc une vertu républicaine aussi importante que n'importe quelle autre. Elle n'est pas restrictive, puisque tout le monde est invité à exprimer son opinion, à écouter les avis contradictoires et à œuvrer en commun. Elle s'impose avec une égale nécessité sur les représentants (ministres ou parlementaires, patrons et managers des entreprises) et sur les citoyens (électeurs, employés, etc...)

  1. Egalité.
Quelques définitions et acceptions pour commencer.

  • Principe selon lequel tous les citoyens peuvent invoquer les mêmes droits.

  • Uniformité, continuité.

  • Les anarchistes revendiquent l'égalité à la fois économique, sociale et morale pour tous les individus. Egalité et liberté sont indissociables, dans la mesure où elles procèdent toutes deux de l'autonomie et de la prise en charge individuelle et collective.

  • Valeur de référence de la démocratie, elle s'entend comme égalité des droits. Elle est, avec la liberté et la fraternité, l'un des fondements de la République Française proclamés par l'article 2 de la Constitution de 1958.

  • Mot trompeur ; ayant changé de sens à la fin du XXe siècle, il ne désigne plus l'égalité juridique des personnes ni l'égalité des revenus mais celle des statuts sociaux réduite à une question de parité statistique (qui menace moins l'élite au pouvoir que la remise en cause du pouvoir économique).

  1. Équité.
Autre terme généralement assimilé à l'égalité mais avec des nuances.

  • Sentiment naturel, spontané, du juste et de l’injuste; Traitement de chacun selon ce qui lui revient de droit, selon son mérite.

  • L'équité est un principe de droit administratif. Le « devoir d'équité » signifie que l'évaluateur doit demeurer ouvert lorsqu'il examine avec soin toutes les preuves d'un cas afin de déterminer si l'invalidité répond ou continue de répondre au critère d'invalidité « grave et prolongée ».

  • Le principe d'équité caractérise le droit de chacun à « en chier » comme tout le monde. Synonymes : égalité, justice. « Ce sur quoi on ne peut pas transiger c'est le principe d'égalité, d'équité. Tout le monde doit cotiser 40 années » (Nicolas Sarkozy - septembre 2007).

  • Reconnaissance de la nécessité d’appliquer des mesures pour assurer la justice. Des pratiques visant à assurer l’équité sont mises en œuvre pour éviter que des groupes donnés soient désavantagés et corriger les inégalités, notamment par des mesures d’adaptation visant à tenir compte des différences et des programmes destinés à éliminer les obstacles.

  • Recherche d'une réalisation réelle et effective de l'égalité des chances, en favorisant plus certaines catégories (principe de la discrimination positive).
Les deux notions se complètent et se rejoignent. Que dire d'autre sinon que le devise de la république est « Liberté, égalité, fraternité » et que l'application des ces trois mots dans la vie quotidienne de chaque habitant du pays (quelles que soient ses nationalité, origines, croyances, opinions et modes de vie) devrait être une référence incontournable et faire l'objet d'une attention toute particulière plus que les questions préliminaires de constitutionnalité dans l'élaboration de tout projet de société.
Messieurs, vous qui avez élaboré le texte de cette constitution, pensez à en respecter les articles, les citoyens de ce pays vous en seront reconnaissants.

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